Collateral Beauty – Beauté cachée, Amour, Temps, Mort 

*J’ai écris ce texte pour mes élèves en photo du CAPV, Centre d’Arts Plastiques et Visuels de la ville de Lille. Je suis heureuse de le partager aussi ici pour qui voudra le lire.

Collateral Beauty – Beauté cachée, Amour, Temps, Mort 

On vit des jours étranges lors de ce temps “infecte”. La pandémie a arraché nos vie à leur équilibre, nous a privés de la liberté, de la proximité, du contact. Cette situation inhabituelle, imprévisible, est sûrement perturbante et en même temps elle peut-être fortement fondatrice. 

On est appelés à développer de la force intérieure, de l’endurance, et en même temps, sans trop d’effort, il y a une sorte de résilience qui s’installe, malgré tout, malgré nous.  

Au delà la peur et de l’angoisse, des choses se passent, de toute petites choses qui dans le confinement de cette vie nouvelle, microscopique, à mesure de nos appartements, de nos maisons, ces toutes petites choses deviennent énormes. Maintenant qu’on a du temps, ou pour mieux dire un temps « autre », on voit plein de choses comme si c’était la première fois : c’est ce qu’on peut appeler “la beauté collatérale”, ou “la beauté cachée”.  

Il y a un film américain, plutôt blockbuster – Collateral Beauty, de David Franke, 2016 -, qui en parle. 

“Vous avez reçu un cadeau, cette profonde connexion avec chaque chose. Cherchez-la, et je vous promet qu’elle est là, la beauté cachée” – Madeleine, “Beauté Cachée” .  

Le film s’interroge sur comment trouver un sens et voir la beauté collatérale même dans la douleur. Le protagoniste, un père qui fait face à la mort de sa fille de 6 ans dans le moment de réussite maximale de sa vie, fait un chemin tortueux pour trouver la force de donner un sens à sa vie face à cette perte. Il est persuadé que nous sommes tous motivés dans notre vie par trois choses : nous cherchons l’amour, nous tentons de gagner du temps et nous sommes effrayés par la mort.  Amour, Temps, Mort. Trois mots, trois symboles, trois éléments à qui vont le décider à écrire une lettre pour exprimer sa colère et sa tristesse suite à son expérience de perte. 

Amour, Temps, Mort, trois notions abstraites qui caractérisent aussi ce temps de pandémie.  

Amour car on a peur pour nos proches, pour nos amis et ça nous manque leur contact. 

Amour et sens d’union pour qui est en confinement comme nous, avec nous, pour nos voisins que peut-être on connaît à peine mais avec qui on est maintenant solidaires, et amour pour qui est en première ligne dans la gestion de la crise, amour pour qui souffre. Amour pour nos vies, pour notre normalité que maintenant on regrette. Amour pour toutes les petites choses qui font actuellement notre quotidien – un rayon de soleil, le fait d’avoir un jardin ou un balcon, une fleur qui éclos, le printemps qui nous offre ses signes. L’Amour est le goût même de la vie : en ce moment où on ne peut pas croquer la vie à pleines dents comme on le fait d’habitude, l’Amour s’installe dans les petites choses. 

Temps car maintenant notre rythme est différent. On a probablement plus de temps et on vit aussi dans un temps suspendu car on ne sait pas exactement combien de temps cette situation peut encore durer. Le temps, en ce moment, est un élément propice à l’observation de ce qui nous entoure et à l’auto-observation. Observons-nous. Qu’est ce qu’on fait, comment on se sent ? Comment réagissons nous à cette situation? Quels sont les signes de notre nouvelle dimension temporelle. Peut-être qu’on fait des choses qu’autrement on ne ferait pas. 

Mort, car la peur est là et maintenant on passe du désinfectant partout, on porte des masques cliniques de protection, on reste confiné chez nous. Ce virus nous confronte violemment avec ce qu’il y a d’essentiel, d’existentiel, de profond. La Mort nous accompagne pendant la pandémie. « La peur est la sagesse de la mort » elle nous donne la prudence, indispensable pour se protéger en ce moment. 

Je propose ces trois pistes pour exercer votre regard à la découverte de la beauté collatérale, ou de la beauté cachée.  

Rossella Piccinno (mars 2020)